mardi 11 octobre 2016

Un féminisme où les hommes seraient des alliés ?

Récemment, j'ai eu un débat en live avec un homme que je connais.
C'était fatiguant.
Et ça s'est poursuivi sur facebook parce que j'ai pas été capable de fermer ma bouche en lisant "féminisme débilisant".

Ce qui était le plus décevant dans tout ça c'était le côté "mais si je suis pour l'égalité homme/femme je suis un féministe mais juste le mouvement devrait pas se construire comme ça / y'a plus important / nous aussi on est opprimé / mais non vous confondez tout.".

Je me suis rarement battue avec des femmes au sujet du féminisme. J'ai rarement lu des débats où la personne qui utilise toutes les ruses rhétoriques pour gagner la partie (détournement des arguments, réponds à côté, occulte une partie du raisonnement) est une femme.
J'ai toujours dû tenter de légitimer ce terme aux yeux des hommes.
Toujours dû rassurer "mais non je sais bien que tous les hommes ne sont pas comme ça."
Être gentille.
Pas trop agressive.
Pédagogue.



Je sais pas si vous le savez mais faire dans la pédagogie quand on vous heurte (oui me sortir en face qu'on est mieux placé que moi pour parler de comment on ressent une agression sexuelle c'est violent, sorry not sorry personne qui se reconnaîtra dans ce message s'il le lit)(boum je règle mes comptes via le blog, que suis-je devenue) c'est épuisant. Réexpliquer sans cesse les mêmes bases à des personnes qui ne cherchent même pas à s'informer c'est épuisant.
Les gens, je ne suis pas votre maman, internet existe, les livres existent, youtube existe, des contenus pédagogiques il y en a partout, à la porté d'à peu près tous les niveaux de déconstruction.

Aussi, le féminisme n'a pas besoin d'être à propos de vous. Le féminisme, c'est une reprise de parole de la part des femmes, pour les femmes. Et pas contre les hommes, mais contre une oppression systémique basée sur le critère de genre.
Alors oui, bien sûr il y a aussi des oppressions faites aux hommes, à cause du même système, et souvent vous vous plaignez qu'on n'en parle pas.
Mais j'aimerais savoir combien dans tous ceux qui l'ont utilisé comme un argument en avaient subi.
Combien, dans tous les gars qui m'ont sortis "oui mais les hommes aussi se font violer par les femmes", l'on été. Combien des mecs qui se sont plaints à moi que le père n'a jamais la garde des enfants / de congé parental pour s'occuper de ses enfants on réellement des enfants. Combien de ceux qui ont évoqué les violences conjugales envers les hommes en ont souffert.
Les souffrances qui ne sont pas les votre ne peuvent pas être un instrument dont vous vous servez quand ça vous arrange.
C'est exactement la même chose que quand on répond à un végétarien qu'en attendant y'en a qui crèvent de faim en Afrique (l'Afrique, ce magnifique pays dans lequel on va piocher des exemples de misère quand ça nous arrange *soupir d'ironie blasée*). Vous ne pouvez pas défendre des causes quand ça vous arrange. Et surtout, instrumentaliser une souffrance pour attaquer une cause qui se bat contre des oppressions systémiques, c'est dangereux.
Si des choses bougent du côté de la représentation des genres - et donc du côté des oppressions masculines aussi, ça n'a pas l'air d'être clair dans vos têtes -, ce ne sera pas grâce à vous. Mais aux autres. A ceux qui ne perdent pas leur temps en cassant de la/du féministe et en essayant de lui expliquer comment devrait être son mouvement et sur quoi il devrait se concentrer.

Pour moi un féminisme où les hommes sont les alliés c'est un féminisme où ils ne cherchent pas sans cesse à attirer la parole à eux.
Un homme avec un vécu de victime qui est lié au sexisme ou au patriarcat a toute sa place dans un espace de parole féministe, et j'irais même jusqu'à dire qu'il est nécessaire au féminisme.
Un homme qui se sert du vécu de victimes pour décrédibiliser un mouvement devrait juste...se taire. En fait.



Oui voilà.
Si vous voulez être des alliés, respectez la parole des femmes.
(Et si vous êtes vraiment respectueux, personne vous volera dans les plumes en vous disant que vous ne l'êtes pas)(promis)(en général les gens ne sont pas paranos vous êtes juste aveugles à leur ressenti).


3 commentaires:

  1. Merci toi ♥

    Je crois que c'était un message équilibré et juste et avec ce qu'il faut de bienveillance et d'intransigeance.

    Câlins sur toi <3

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  2. Ton titre m'a tapé dans l’œil, il m'a fait penser à l'une de mes propres réflexions sur hommes et féminisme... l'article était "et les hommes alors ?" je crois...

    Je crois... que l'on a besoin des hommes. Parce que les hommes aussi sont cible de clichés, que les genres se sont construits en regard l'un de l'autre, que c'est parce que l'on a l'image d'une fille pleurnicheuse que les garçons ne doivent pas pleurer... Comme tu dis : ce n'est pas contre les hommes, et c'est pour cela que l'on a besoin d'eux : les hommes et les femmes contre les clichés, contre les rôles de genre assignés. C'est pour ça que l'on a besoin des hommes. En tout cas c'est mon féminisme, c'est ce que je défends. Maintenant il est clair que quand un homme qui se dit féministe n'a qu'à la bouche "oui mais nous les hommes" alors que précisément le féminisme se bat pour les hommes ET pour les femmes (puisque contre les rôles de genres) c'est embêtant. Je me bas pour les femmes et pour les hommes et je reconnais qu'il y ait des clichés et du sexisme à l'encontre des hommes (Rayane Bensetti mit torse nu dans DALS, qu'on le veuille ou non, c'est du sexisme). Simplement, les hommes qui démontent le féminisme en disant "les hommes aussi" ne sont pas féministes. En fait, ils sont dans le même mécanisme que les gens qui disent en réponse au racisme "ouais, mais y'a du racisme anti Blancs". Les hommes qui disent "oui mais les hommes" comme seule réponse, sans se préoccuper vraiment des femmes, ne sont pas féministes et décrédibilisent les hommes qui sont vraiment féministes.

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