mercredi 28 septembre 2016

Et le nivellement par le bas m'est tombé sur la tête

Je t'avertis dans cet article je vais me plaindre et être triste.


Cette année on a réformé ma licence.
Donc je me retape un mélange de ma L1 et de ma L2. Soit. On peut toujours creuser encore le romantisme, la rhétorique, la méthodologie du commentaire composé (ha non, ça non). Si vous voulez.
Sauf qu'on creuse pas.
On ne fout rien. Littéralement.
Bon, ils ont ouverts tous nos cours de lettres à des spécialistes d'autres disciplines alors faut bien les rendre accessibles aux autres gens.
Mais on ne fout rien. J'étais toujours à me défendre "oui mais on a beaucoup de travail les lettres c'est exigeant" et c'était vrai et puis maintenant j'ai un seul commentaire à rendre sur le semestre (et environ une dizaine de versions latines mais c'est pas la question) et heureusement que j'ai pris du polonais cette année parce que sinon je n'aurais eu qu'un cours qui exige quelque chose de moi.
Je suis en train de vriller complètement dans ma tête, je passe les cours sur facebook parce que si j'écoute vraiment j'ai envie de hurler, de pleurer et de partir, c'est horrible à quel point c'est violent comme situation. Pour une fille complètement traumatisée par l'école où on s'ennuie, où on ne comprend pas qu'on demande du travail alors que c'est tellement simple (coucou le HQI), c'est ultra atroce à gérer. Ma raison de me lever le matin, aka les cours de littérature, apprendre des choses, vivre de nouvelles expériences intellectuelles, me sentir stimulée, tout ça...C'est mort.

Professionnalisons la licence de lettres et enterrons les gens dedans.

A force de vouloir que je produise quelque chose dans votre société vous allez finir par détruire tout ce que j'aurais pu faire, dire et apporter !

En une seule petite réforme le seul endroit lié à l'école dans lequel je me suis jamais sentie bien est devenu une prison où je m'ennuie. Je n'ai plus de motivation pour abattre du travail, pour lire, pour réfléchir, à quoi bon on ne nous demande pas de le faire. Être là, et encore.

En tant qu'élève c'est ce qui m'a toujours démotivée c'était de sentir que je pouvais donner mon minimum et que ce serait satisfaisant. Je ne me souviens pas d'une seule fois où j'ai ouvert un cahier pour réviser de toute la primaire et de tout le collège. D'une seule fois où j'ai fais mes devoirs, en fait - sauf chez les autres parce que les mamans faisaient faire les devoirs et vérifiaient le cahier de texte. Je n'en ai jamais eu besoin. Au lycée, idem. Les seules matières où j'échouais étaient celles qui demandaient du par cœur et beaucoup de devoir maison (je ne les faisais pas). Je suis la fille énervante qui a eu mention bien au bac en ayant révisé deux heures.
Parce que c'était trop facile pour moi. Je m'ennuyais, rien n'était approfondis assez, ou assez intéressant. J'ai survécu à mes deux premières années de lycée et j'ai haïs aussi fort la terminale parce que ce qui nous tenait lieu de cours de littérature s'est retrouvé décevant au possible (à croire que l'oeuvre au programme c'était les annales du bac).
Et là on recommence ?
Encore ?
Encore l'ennui, encore les heures où on voudrait être ailleurs, les yeux qui se perdent ailleurs, loin, le livre qu'on écrit en cours, les cours qu'on écrit pas, et on s'en sortira quand même, l'épuisement mental, l'insomnie - la vie est vide et noire - l'envie d'arrêter et de partir vivre dans le bois ?

Faire contre mauvaise fortune bon cœur TOI MÊME.

Vomir-hurler.


Je hais cette réforme !
Je hais qu'on ait détruit ce qui faisait le cœur de ma vie et qui me remplissait de joie !
Je hais ce que ça veut dire, qu'on détruise les lettres. Je hais qu'on me signifie qu'il n'y a pas de place dans cette société productiviste pour des bizarres comme moi qui se passionne pour la littérature (elle a des rapports avec tout, la littérature, bande de.), je hais cette envie de pleurer et de taper des poings - l'injustice !

J'ai l'impression de payer trop cher l'impopularité de ma filière. Pour moi c'est pas juste une voie pour aller en école de journalisme, pour faire de l'info com, pour être bibliothécaire, éditrice, que sais-je. C'est ce qui m'anime. Ce qui me fait vivre et ce qui me donne envie de vivre.

Et sans ça je meurs. Loin. Au fond.
J'ai appris à aimer la vie et à croire en l'avenir parce que ce chemin s'ouvrait à moi.
Et il a fallut qu'on l'enlève ?!
Et il faudrait qu'on s'assoie et qu'on se taise parce qu'on est pas assez ?
Qu'est-ce que je peux faire, moi ?
C'est ça qui me tue, qu'est-ce que je peux faire sinon continuer en attendant que l'orage passe ?
S'il passe.

lundi 26 septembre 2016

Avoir 20 ans

D'habitude, je ne fais pas d'articles sur mon anniversaire. Parce que c'est un truc mitigé que je garde au coin de ma tête, l'angoisse de grandir et les gens émouvants et le temps qui passe.
J'adore les bilans, j'adore voir que j'ai avancé dans la vie, dans ma tête. Le truc c'est que jusqu'ici les bilans ils étaient pas très glorieux.

Aujourd'hui j'ai 20 ans.
On est lundi, il fait tout gris, c'est l'automne. C'est une belle journée.
Je me repasse le film du dernier âge "important" que j'ai passé. 18 ans, l'angoisse de n'avoir rien réussi, l'angoisse d'être adulte, ça y est, l'angoisse l'angoisse l'angoisse.
J'ai 20 ans, j'ai peur mais j'ai plus peur. Je sais où je vais, pourquoi, comment. Je ne suis pas devenue la meilleure personne au monde en 20 ans et sûrement pas ma personne préférée dans le monde mais je peux enfin me prendre par la main et être ma propre alliée au lieu de chercher à m'enterrer tout le temps.
Quand j'ai eu 18 ans je venais de rentrer à la fac après un an à marcher en enfer et puis j'ai continué un peu le chaos. J'étais persuadé que le seul moyen d'exister c'était par la douleur et je m'explosais dans tout ce que je faisais pour me sentir vivante, à force de chercher l'Idéal. Je voyais le beau et l'enfer en même temps. C'était bien. Si j'avais continué comme ça j'aurais pu mourir. Mais je ne pensais vraiment pas que la vie ça avait un intérêt si on était heureux et qu'on se contentait de l'apprécier simplement.
Maintenant du haut de toute ma vieillesse (j'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans, comme dirait l'autre) j'ai compris que tout ce qui était à embrasser dans la vie l'était dans le quotidien plutôt que dans un absolu qui caracole loin de moi, de nous. Parfois je me dis que je suis devenue simple et que je recherche trop le confort mais c'est parfois. Puis je me rappelle que j'ai pas gagné grand chose à me détruire, à part une très bonne connaissance empirique de la dépression.

J'ai plus trop peur d'être une adulte. J'ai rencontré des tas d'adultes qui sont des gens merveilleux - j'ai même des amis qui sont en train de devenir des adultes merveilleux - et tant qu'on me laisse collectionner les peluches panda, vivre dans un plaid et faire des jeux de piste pour mon anniversaire, je veux bien être une adulte le reste du temps. Et pour le futur advienne que pourra.

J'ai plus trop peur de l'avenir. A 14, 15, 16, 17, 18, 19, j'ai été terrifiée par ces chemins qui s'ouvraient et qui semblaient vouloir m'avaler mais maintenant je marche tout droit. Je marche tout droit parce que c'est ce que j'ai à faire. C'est moi qui décide du chemin sur lequel je marche, c'est moi qui ouvre et ferme les portes, c'est moi qui décide. J'ai cette chance-là, autant en profiter.

J'ai changé de dizaine et c'était un vertige, une angoisse. Et puis j'ai fais la liste de tout ce que j'avais accomplis en vingt ans et je me dis que s'il me reste encore 20 années à vivre il peut s'en passer encore des trucs biens. Des trucs nuls aussi, tu me diras.
Mais on va faire confiance à l'univers.
J'ai 20 ans.
J'ai survécu.

Cet anniversaire aura définitivement été placé sous le signe de la bougie.

samedi 24 septembre 2016

La banalité merveilleuse épisode deux

Oui alors en vrai je te dis épisode deux mais je sais plus où est rangé l'épisode un - quelque part en juin/juillet parce que je l'ai écris sur un matelas par terre quand y'avait Remucer.
Donc : la banalité merveilleuse épisode deux.
En ce moment la vie ça va super bien. Après le mois d'août de l'angoisse - sauf si on compte la coupure magique qu'à été la Pologne (je veux y retourner quand je parlerai polonais (parce que pour le moment à part bonjour, pain et au revoir, je sais rien, donc vas-y pour commencer une conversation)) - j'ai eu l'impression que ça allait plus jamais aller bien. C'était épuisant psychiquement et physiquement, la moindre action me demandait des efforts démesurés, j'avais mal au ventre en permanence, la nausée, des migraines et je voyais le mur arriver à toute vitesse sur moi.
Et puis là, tout va bien.
Enfin, tout va pas si bien, ils ont massacrés ma licence avec leur réforme à la con (tu permets, je m'entraîne à parler le langage de prof) et je me suis fendue d'un article pour t'expliquer ça mais je l'ai pas encore publié mais si on fait abstraction de ces choses auxquelles je ne peux rien, la vie c'est devenu trop cool.

Chronique d'un quotidien merveilleux


6h c'est le matin, et si j'arrive à me lever à cette heure-là c'est le bien parce que je peux passer une bonne demi-heure à ne rien faire, à juste laisser passer le temps en buvant mon thé, à faire mes pages du matin (si l'envie m'en prend mais il faut vraiment que je m'y remette), à lire de la lecture "plaisir", avant de rentrer dans la vraie journée.
8h c'est l'heure du tram, et j'adore prendre le tram le matin parce que la ligne B du tram de Grenoble passe au-dessus de l'Isère et que le soleil rasant l'eau et se prolongeant sur la montagne ça a quelque chose de mystique-magique ; pouvoir assister à ça tous les matins c'est comme voir un miracle tous les jours. (Et encore plus maintenant que je sais que la Brunette pratique aussi la contemplation de soleil sur eau tous les matins, dans sa ville lointaine).

18h c'est l'heure du sport (en vrai c'est variable ça fait genre 15 ou 16 ou 17 ou 20h parfois quand on est des noctambules). Depuis fin août je suis inscrite à une salle de sport (ça commence par A et ça fini par maziona si tu veux tout savoir) et ça me fait tellement du bien ! Physiquement, mentalement, je sais pas mais j'adore y aller, j'adore soulever des trucs lourds, compter les répétitions, les séries, pouvoir me mettre dans une bulle composée de mon cerveau et de mon corps, ça m'apaise énormément. En plus la salle où je vais est pas fréquentée par trop de gens, ni par des gens au physique intimidant, du coup je suis pas sans cesse à me répéter que je suis la petite grosse moche qui fait du sport et que les gens me jugent (d'ailleurs je me sens beaucoup moins petite grosse moche)(enfin je suis toujours petite ok mais je suis plus consciente de mon corps (notamment grâce aux courbatures) et ça "calme" un peu la dysmorphophobie - je suis le genre de personne qui fait du 38 mais qui a l'impression de faire du 44).

Sans heures particulière il y a la littérature francophone qui a frayé son chemin tout droit dans mon cœur  parce que j'y ai découvert les études postcoloniales (je te laisse jeter un coup d’œil si ça t'intéresse), le cours de théorie littéraire, celui de rhétorique, le jeu de rôle que j'ai commencé à pratiquer avec mes voisins, l'automne qui est enfin là (j'adore l'automne mais vraiment genre j'aime l'automne même si tu enlèves Halloween et les pumpkin spice latte (t'façon y'a pas Starbucks dans ma ville de paysans)), Grenoble l'automne, la boutique de thé juste à côté de chez moi, le polonais que je vais bientôt apprendre, et tous ces trucs qui rendent la vie super cool.

PS : cette article a été écrit en partenariat avec ma synesthésie, si tu veux comprendre pourquoi j'ai écris les chiffres en couleurs qui te piquent les yeux.
En vrai ça fait : 1 2 3 4 5 6 7 8 9

lundi 19 septembre 2016

Le sexe en gris

A force de traîner mes oreilles dans le milieu militant (même si je ne serais jamais une militante) j'ai appris des tas de mots pour définir les orientations romantiques et sexuelles des gens. Des. Tas.
J'avais pas appris la définition de mon mot à moi. J'avais pas appris que j'étais dans le spectre asexuel parce que j'avais pas cherché plus loin, pensant qu'ayant déjà eu des rapports sexuels et en ayant encore parfois je ne pouvais pas y rentrer. En fait si. Je suis graysexuel.le (oui je me parle au neutre quand ça me chante).

Alors oui, youpi, tu as une étiquette de plus, bravo Betta.
Une étiquette qui veut dire que tu as très peu d'attirance sexuelle et que globalement tu es pas franchement intéressée par ça mais que parfois tu en a envie alors tu le fais.
Qu'est-ce que ça change de le savoir, tu va me dire ?

Tout. Beaucoup. Quelque chose au moins.
ça change ce fort sentiment d'être anormale. Et ça enlève un peu de culpabilité. C'est pas que j'ai la flemme, c'est pas que j'ai un problème, c'est pas que je suis une mauvaise partenaire, je suis juste graysexuelle (je l'ai lu écrit avec un a en premier donc je vais continuer à l'écrire avec un a tapotement sur ta tête si ça te perturbe).
Parce que, que je le veuille ou non, ça met du conflit dans mon couple et ça fait du mal à tout le monde. Au copain de moi qui pense qu'il a un problème / qu'il n'est pas attirant / qu'il est nul, et à moi qui culpabilise de faire du mal en ayant pas envie et en écoutant cette pas envie alors que de mes 14 à mes 18 ans je n'ai trouvé aucun problème à me forcer.



L'étiquette elle fait du bien. Parce que depuis que j'ai 13 ans j'entends que le sexe c'est quelque chose de très désirable et qu'il faut le faire et pendant des heures. J'avais encore 14 ans et j'ai fais le sexe (NON je ne dirais pas "faire l'amour" parce que amour =/= sexe et je hais cette expression et ha ça fait du bien de le dire) avec un garçon et littéralement ça m'a laissé de marbre j'étais genre ha ok bah d'accord bah juste ça me fait rien je m'en fous. Je l'ai refais pour voir et dans ma tête je me disais mais comment je vais faire pour aimer ça c'est nul c'est chiant il se passe rien.
Bon après j'ai eu un peu de vie sexuelle (un peu trop) et grosso-modo à chaque fois que j'étais en couple dès que j'étais avec mes copains je faisais le sexe avec eux parce que je me sentais obligée. Je m'appliquais à être normale alors que. Néant. Je surjouais mon image de fille un peu slutty parce que je pensais que c'était le seul moyen pour qu'on m'aime mais pendant les rapports sexuels je partais ailleurs dans ma tête et je les laissais faire ce qu'ils voulaient avec mon corps.
C'était complètement malsain.
Et puis je sais pas avec le Fou au début je lui refaisais le scénario de "oh regarde comment je suis trop une fille qui fait le sexe trop bien" et puis ça m'a lassée. En fait. En parallèle j'ai commencé à m'épanouir dans la vie et à avoir de plus en plus d'activités, de trucs qui m'intéressaient et du coup...bah clairement passer du temps à faire le sexe ça me semblait pas utile. Genre j'avais autre chose à foutre. J'ai autre chose à foutre.

Est-ce que pour autant, je déteste le sexe et ne prend aucun plaisir ? Non. Quand je fais le sexe, c'est que j'en ai envie (maintenant) et donc j'aime bien. C'est juste vraiment pas fréquent de ouf mais c'est vraiment bien quand ça arrive.
Et en fait je vis vraiment bien cette situation. Je ne me sens pas dépossédée de mon corps, j'ai moins l'impression qu'il est un objet encombrant qui ne m'appartient pas, et savoir maintenant que je fais partie du spectre asexuel, ça me fait du bien, et je ne considère pas ça comme un problème ou une partie de moi qu'il faudrait guérir. Oui j'ai eu des traumas liés au sexe, mais ce n'est pas ça qui a fait que je suis graysexuelle, parce que je le suis depuis toujours (si je me repasse le film de ma vie amoureuse tout prend beaucoup plus de sens si j'intègre cette identité). Et c'est cool.

Du coup ça serait vraiment cool si on pouvait vraiment visibiliser les asexuels, les aromantiques, les polyamoureux (spoiler : le Docteur dans Doctor Who est polyamoureux. Deal. With. It.), les pansexuels, les homosexuels, les transexuels, les agenre, les non-binaires, bref, tout le monde. Parce que y'a pas du tout de modèle si tu veux te construire. Parce que (trop souvent) on va te dire que tu as inventé ton identité sur internet. En oubliant que si tu te retrouves à te rabattre sur internet c'est que les médias traditionnels ne parlent pas du tout de ça. Que ce sont les médias qui visibilisent la manif pour tous plutôt que les associations LGBT+. Bref, le journalisme et le bien que j'en pense, c'est pas le sujet.

Aujourd'hui j'ai appris que j'étais graysexuelle et c'était la joie.

(Note de service : ça y est les cours on repris et j'ai un EDT plutôt léger et bien organisé mais y'a des tas de galères administratives et mon ordi était pas réparé mais ça y est tout va aller un peu mieux niveau rythme de publication sur le blog.)

jeudi 8 septembre 2016

Le carnet qui te fait un câlin

Comme à peu près 99% des gens, je collectionne les carnets (si tu ne collectionnes pas les carnets, c'est vraiment triste pour toi parce que les carnets ça ressemble à des livres mais y'a rien d'écrit dedans donc c'est comme des livres mais tu peux les écrire. Donc c'est vraiment trop cool tu devrais collectionner les carnets).
Comme une bonne proportion des gens sur cette planète, j'ai quelques carnets qui sont en attente d'un emploi, soit parce que je les ai acheté en guise de futur journaux intimes (ou "carnet à vidage de tête"), soit parce qu'on me les a offerts et que du coup j'ai pas eu de projet spécifique pour eux, soit parce que je les ai acheté et qu'ils sont trop beaux mais qu'en fait ils sont pas pratiques (genre ils sont pas spiralés)(je sais pas les gars, qui arrivent à écrire sur un carnet qui a DEUX PAGES côtes à côtes ? Vous êtes des gens étranges, les designers de carnets).
Bref.
Tout ça pour dire que j'ai quelques carnets.
Et que donc j'avais ce magnifique carnet paperblank Virginia Woolf (il est VIOLET) (et Virginia Woolf) (et paperblank) que le fou m'avait offert et qui devait venir remplacer mon journal intime quand j'aurais terminé ce magnifique carnet paperblank St Exupéry que mes parents m'ont offert. Sauf que l'achèvement du carnet traînait en longueur (il traîne toujours d'ailleurs je suis moins que régulière et puis c'est lourd un paperblank et j'ai le dos faible).
En parallèle de ce carnet, je m'étais mise à collectionner les extraits de conversations, d'articles, de pensées qui me faisaient du bien sur le moment dans un fichier informatique.

(A ce stade de l'article je pense que tu me vois venir avec mes gros sabots plein de pieds)

Donc. J'ai créé un carnet. Je lui a fais une page de garde entièrement coloriée en noir avec les mots "LES JOURS NOIRS" qui se dessinent sur la page, parce que c'était bien ce que je ressentais à ce moment-là, que j'étais dans des jours noirs (je faisais des crises d'angoisse tout le temps et j'avais tellement peur de tout que toute mon énergie était partie et que j'arrivais plus à manger sans me forcer parce que "come on tu veux pas mourir tu sais" (j'étais pas tellement sûre, d'ailleurs (maintenant je connais la dose létale d'ibuprofène))).
Et puis j'ai marqué les mots.
Les mots de Jack Parker sur sa dépression.
Des mots de moi à moi quand je me parle gentiment et que j'ai l'énergie de vivre par-dessus les troubles.
Des mots du Fou à moi.
Des mots de Remucer à moi.
Des mots de la Brunette.
Des citations d'articles qui m'ont fait du bien.



J'ai fais un gros recueil de choses qui sont à la fois inspirantes en mode "relève toi fais des choses" et en mode "câlin c'est pas grave si là tu as pas réussi à te comporter comme quelqu'un qui va bien, tu n'es pas quelqu'un qui va bien, ça veut pas dire que tu n'es pas quelqu'un de bien" (et dedans j'ai mis des "déclarations d'amour" du Fou et de Remucer pour me calmer pendant mes crises où j'ai l'impression que les deux vont se barrer loin de moi et me haïr et m'abandonner).

Donc quand ça va pas j'essaye de lire ce carnet.
Est-ce que ça marche vraiment ?
Pas toujours.
Parfois je suis dans un endroit de ma tête inaccessible à la bienveillance et du coup rien de tout ça peut me calmer il faut juste attendre que la vague passe en serrant très fort les dents et les poings. Mais même dans les cas où ça marche pas, ça a quand même un effet. ça me rappelle qu'à un moment j'ai eu assez d'amour envers moi pour créer un carnet qui me rappellerait des bonnes choses dans les mauvais moments et que donc tout n'es pas perdu, que ces moments existent et qu'il y a toujours un échappatoire (d'ailleurs c'est une phrase écrite en très gros, "THERE IS ALWAYS A WAY OUT", parce que c'est très important que je m'en souvienne (et que je me souvienne qu'il n'est pas dans une boîte d'ibuprofène)).
Et parfois relire les mots ça suffit à me dire que oui, ça va aller, et que rien n'est aussi noir que ce que je pense.

Bref. Si tu as un carnet que tu n'utilises pas (ou que tu traverses des périodes nulles parfois) je t'encourage vivement à te créer un carnet spécial jours tout noirs que tu pourrais relire quand tu as envie. Tu peux mettre ce que tu veux dedans, des paroles de chanson, des mots de gens que tu aimes, des extraits des Vagues de Virginia Woolf...L'idée c'est qu'en le relisant ça te fasse l'effet d'un câlin géant.




L'idée c'est que ça te fasse cet effet-là en l'ouvrant.










lundi 5 septembre 2016

Je fais lentement l'abandon du grand manteau qui me calfeutre

(Et à mes heures perdu je cite Cyrano d'Edmond Rostand).

Y'a pas si longtemps de ça je me suis retrouvée à passer tous mes moments seule en PLS avec une forte envie de vomir et les neurones qui tournaient en boucle sur "tu rentres en L3. L'année d'après, c'est le master, tu vas devoir commencer à te préparer pour le CAPES et à enseigner et une fois que tu en seras là tu devras te battre pour arriver dans l'enseignement supérieur et tu n'y arriveras pas et tu n'auras plus jamais assez de cuillères pour écrire et t'épanouir parce que come on tu n'es déjà pas capable de vivre comme une personne normale quand tu n'as rien à faire", en général suivi d'une réaction totalement paniquée et épidermique de "mais je ne veux surtout pas faire ça" et d'un fort sentiment de "ça y est je suis prise au piège".
Et comme ça. Encore et encore.
C'était pas vraiment la façon dont je voulais que ces vacances se terminent.

J'étais déjà parfaitement au courant que si j'avais un obstacle dans la vie qui allait me poser problème, c'était ma santé mentale pas très...en santé, en fait. Et là, en voyant l'échéance se profiler doucement au loin - j'aime m'angoisser pour un futur que je ne peux pas maîtriser - j'ai réalisé que vraiment, ça n'allait pas le faire.
Je suis incapable de supporter le stress que ça engendrerait de devenir prof.
Du coup ça me semblait carrément injuste de me retrouver prof alors que mon rêve dans la vie c'est de devenir un écrivain et que prof c'était l'option "oui mais comme ça je continue à faire de la littérature" (et puis je ne déteste pas l'idée d'enseigner, j'aime vraiment l'idée d'apprendre des choses aux gens (et sincèrement je pense que j'aurais été une prof cool), simplement je ne me déteste plus assez pour penser que je dois sacrifier ma santé mentale pour avoir un travail).
Alors voilà, j'étais là avec ma tête bloquée dans cette situation et l'idée que j'étais condamnée à continuer comme ça sinon j'allais échouer et tout le monde allait m'en vouloir (je vous ai déjà dit que c'était compliqué d'être vue comme celle qui a des bonnes notes et c'est comme ça et personne n'envisage jamais l'idée que tu échoues ?), quand ma meilleure amie alias la Brunette m'a rappelé une chose certes pleine de bon sens mais que du haut de mes 130 et quelques de QI j'avais oublié (à vrai dire je pense que vu comme je suis pas capable de gérer la vie avec mon cerveau on devrait donner mes points de QI à quelqu'un qui saurait en faire quelque chose) :

"Nos choix ne sont pas définitifs à la vie à la mort, il y a toujours moyen d'arranger les choses pour qu'elles aillent plus dans notre sens si jamais ça dérape".

Du coup ça a réactivé mes neurones qui s'étaient tous mis à hurler dans tous les sens et ô, miracle.
Je peux faire ce que je veux.
Je peux développer mon blog et commencer à envoyer des articles pour d'autres sites.
Je peux écrire, beaucoup, beaucoup, beaucoup, et être publiée un peu.
Je peux ne pas avoir un CDI et être précaire et un peu pauvre.
Je peux garder les portes ouvertes.
Je peux enfoncer les portes que j'ai fermées pour le moment.
Je peux ne pas avoir ce "filet de sécurité" qu'est le CAPES et mettre toutes mes forces dans la bataille - et devenir chercheuse en littérature.
Je peux dire "screw all of this" et passer un CAP de coiffure.

En soit, ça a pas résolu magiquement toutes mes angoisses - parce que phobie scolaire et qu'en ce moment grosse phase dépressive - mais le fait de réaliser que j'étais pas obligé de m'en tenir à ce que je réponds toujours quand on me demande ce que je veux faire plus tard, que la seule personne qui avait le droit d'avoir des attentes de ma part c'était moi, bah.
J'ai respiré.
J'ai recommencé à pouvoir manger un peu - et surtout autre chose que du pain.
J'ai fais le tri dans ma tête sur ce que je voulais vraiment - écrire, lire, faire un peu de bien dans ce monde tant que je suis dedans - j'ai cherché des options pour après la licence qui me conviendraient (j'en ai trouvé), j'ai planifié mes petits trucs administratifs pour avoir moins peur, et j'ai repris mon stylo.

J'essaye de me débarrasser des influences que j'ai dans ma tête. Je discute beaucoup de moi à moi, avec les gens autour aussi un peu, et si je n'ai toujours aucune idée de ce qui va se produire cette année - est-ce que je vais craquer, ne pas réussir à aller en cours, redoubler, ou est-ce que tout va bien se passer ? (la réponse au prochain épisode) - je sais que je marche toujours dans la bonne direction.
Et que je peux continuer à être une survivante.